« Lorsque j'ai entendu pour la première fois James jouer au piano les thèmes du film, j'ai su alors que ça allait être extraordinaire, mais je dois dire que je n'aurais jamais imaginé à quel point elle serait spectaculaire, parce qu'il a créé là l'un de ces rares moments de magnificence qui nous laissent sans voix».
« Je sais qu'il m'est impossible d'être objectif, mais j'ai travaillé sur Titanic et j'adore toutes les musiques de James (Braveheart, Apollo 13, Field of Dreams, etc, etc.), et ceci est sa musique la plus expansive, la plus passionnante et la plus émouvante. Elle est en tout point parfaite. Ce n'est pas seulement son oeuvre la plus belle (à mon humble avis), mais il s'agit de l'une des plus belles musiques jamais produites pour un film. Je n'exagère pas, et je suis impatient que tout le monde puisse bientôt découvrir cette oeuvre ! »
« La difficulté que j’ai à trouver une maison de distribution qui veuille bien s’occuper de distribuer ce film reste pour moi un mystère. Nous nous sommes adressés à toutes les plus grandes maisons de distribution du cinéma, conformément aux pratiques en cours, en ne négligeant rien. Nous étions persuadés que la qualité technique parfaite du film, son histoire convaincante, la qualité de sa distribution de par la présence d’acteurs de renommée mondiale dans les rôles principaux nous seraient favorables et malgré tout cela nous n’avons rien obtenu pendant des mois hormis des obstacles ».
Finalement après une sortie remarquée au mois d'avril au Mexique et plus discrète début juin aux États-Unis, For Greater Glory : The True Story Of Cristiada est sorti en DVD et Blu-Ray le 11 septembre dernier avec des sous-titres anglais et espagnols. Vraisemblablement handicapé par sa thématique pro-catholique le film ne connaîtra jamais de sortie internationale.
« Le bonheur, c’est l’attente, l’attente heureuse, la confiance ; C’est un horizon plein d’espérance, c’est le rêve. » (Guy de Maupassant. Souvenirs – 1884).
Enfin il ne faut pas oublier le don de James Horner pour la narration. Il a construit pour l'album une succession parfaite de tableaux dramatiques. Certes nous trouverons toujours des morceaux plus appréciés que d'autres mais durant l'écoute il n'existe aucun creux, aucun vide il se passe toujours quelque chose. Même les moments de calme nous offre des instants hypnotiques tel ce solo de cor dans José Saves Catorce (1'36) un des plus longs et des plus beaux de sa carrière. Cette régularité dans la qualité est assez rare de nos jours surtout quand le disque affiche près d'une heure vingt au compteur. De l'introduction à la conclusion James Horner réalise le miracle d'articuler les idées musicales en les reliant toujours avec élégance et pertinence. Avec For Greater Glory il rend une copie de haut niveau et excelle une nouvelle fois dans l’enchaînement des émotions.
« La musique est une pompe à gonfler l'âme » (Milan Kundera. L’immortalité – 1990).
0'00 – 1'06
Instant poétique par excellence: accompagnée d’un orchestre tout acquis à sa cause, la voix de Clara Sanabras transperce littéralement le ciel. Les vers du poème apparaissent en parfaite synchronisation à l'écran.
Piste 3 : 0'23 – 0'47
Des chœurs percutants et des guitares endiablées, version plus ténébreuse mais toute aussi désinvolte de Zorro, accompagnent l’apparition du légendaire "Catorce", lequel se débarrasse sans pitié d'une troupe de fédéralistes.
Piste 4 : 2'57 – 4'03
L'orchestre interprète une version délicate et tendre du thème "Entre La Luz Y El Pecado".
Enrique Gorostieta promet à sa femme Tula de revenir vivant du conflit qu’il a décidé de mener. L’apaisement comme point de non retour vers un destin déjà en place.
Piste 6 : 1'00 – 2'22
Une cloche funeste, des chœurs plaintifs, des cordes sombres…
Les Cristeros enterrent un village entier, décimé par l'armée fédérale. Justesse et simplicité du discours musical.
Piste 7 : 1'43 – 2'43
Le général définit la notion de liberté et motive ses troupes avant une journée de bataille déterminante.
James Horner cite judicieusement Braveheart et son hymne à la liberté. Les cors répondent à la clarinette dans un dialogue empli d’espoir et de sérénité, qui navigue sur un matelas de cordes dont les couleurs opaques ne laissent planer aucun doute sur le prix à payer pour cette quête de la liberté.
Piste 8 : 1'35 – 2'42
Lors d'un combat mal engagé, le jeune José laisse son cheval à Catorce pour qu'il puisse continuer à se battre. Une fois le calme revenu, celui-ci tente le retrouver le garçon. Un solo de cor magnifique accompagne la solitude et les premiers regrets du cavalier quand il comprend que José a été fait prisonnier.
Piste 9 : 0'00 – 2'10
Les Cristeros attendent l'entrée des troupes fédérales dans un village pour les prendre à revers.
Moment de tension et d’énergie extrême, accelerando fulgurant qui replonge et prolonge la furia de Troie, les quatre notes défigurées en filigrane. Performance chorale saisissante qui réinvente à bon escient les clameurs tribales héritées d’Avatar. Tout est lié et relié dans un maelström vertigineux de folie meurtrière et de foi irrépressible, telle l’union désespérée du profane et du sacré.
Piste 10
Renversement chronologique au profit de la cohésion musicale. Les femmes porteuses de munitions risquent d'être démasquées lors d'un voyage en train. James Horner reprend des couleurs déjà développées dans Les Disparues et qui mettaient en avant un acte héroïque accordé au féminin. Fougue, angoisse et détermination qui ne laissent place à aucune faille orchestrale alors même que la peur tenaille les protagonistes. Plus que jamais, la virtuosité n’a d’autre raison d’être que de soulever la charge émotionnelle et donner aux personnages la force nécessaire.
Piste 11 : 1'55 – 3'25
Sommet de la musique dans son rapport à l’image, dénué de tout bruitage et dialogues encombrants. Le réalisateur fait une confiance aveugle au pouvoir de la émotionnel et spirituel de la musique, et pour quel résultat… Les percussions, la voix de Clara Sanabras et les chœurs à l'unisson accompagnent le "chemin de croix" de José avec une intensité rarement atteinte dans l’histoire de la musique de films. La tragédie est à son comble et si le compositeur déverse toute sa rage et sa souffrance, si l’image et la musique en osmose transcendent l’injustice et l’horreur, cette création unique ne se départit jamais d’une extrême dignité. La voix de l’ange succède à la celle de l’épouvante. Ou comment exacerber les émotions et fustiger la folie des hommes avec une pudeur salvatrice.
Piste 12 : 0'00 – 1'35
Le général arrive trop tard pour sauver José. L’heure est au recueillement et la voix de Clara Sanabras ne fait plus que bercer et consoler. L’orchestre se retire pour laisser place à un effectif instrumental minimal. Déchirante sans être larmoyante, à l'image d'un "Unable To Stay, Unwilling To Leave" (Titanic), la musique accompagne seule les images en imposant un silence de mort. La foi vacille et l’espoir s’éloigne.
Piste 13 : 3'46 – 7’14
La renaissance vécue à travers la révélation de sa propre foi, dans les hommes plus que dans les idées, et le courage élevé au rang d’allégresse macabre. La mort des braves et le sacrifice des justes inspirent comme souvent à James Horner une chevauchée épique (le général évacue ses troupes) d’une fluidité toute aérienne, comme suspendue entre deux mondes. Les cuivres et les chœurs engagent une danse du feu et de l’eau qui prend aux tripes. Musicalement jubilatoire, émotionnellement épuisant… jusqu’au coup de cymbales libérateur.
Piste 14 : 3'50 – 5'00
La flûte de Tony Hinnigan enclenche la dernière variation du thème ascensionnel qui se conclut par une envolée majestueuse des chœurs et de l'orchestre. Une véritable élévation (l’aspect ascensionnel du thème ne doit rien au hasard) qui rend le plus bel hommage possible à la mémoire des victimes sacrifiées sur l’autel de l’intolérance et du pouvoir. La peinture des émotions repose sur un équilibre harmonique tout dévoué au souvenir et à la compassion.
Le miracle a eu lieu, le compositeur nous revient avec une œuvre grandiose qui aurait du être entendue par le plus grand nombre. De par sa puissance émotionnelle et sa technicité, For Greater Glory soulève la musique de films à un degré trop peu souvent atteint. C'est une immense partition qui pourrait aisément rejoindre le céleste Mission d'Ennio Morricone au panthéon de la musique pour le cinéma. Certains pourront trouver le parallèle exagéré. Pourtant celui-ci est cohérent au regard des similitudes qui relient les deux partitions : ce sont deux histoires chrétiennes, les compositeurs avaient tous les deux cinquante-sept ans lors de la conception, les mêmes chœurs (London Voices) et le même flûtiste (Tony Hinnigan) ont été conviés à transcender les thèmes.




