« James était très en avance sur la combinaison de l'orchestration et de l'électronique. Ses partitions étaient très spéciales de cette façon, » dit Walter Hill dans une interview exclusive pour notre livre sur James Horner en cours d’écriture. « Il avait l'habitude de diviser ces choses en lignes très claires, et il a fait tomber beaucoup de ces lignes, et a brisé les barrières. Cela lui a donné un son très unique.. »
À première vue, ces nouvelles éditions pouvaient sembler facultatives. Intrada avait déjà proposé en 2011 une édition de 48 Hrs. présentant l’essentiel de la musique, et les quatre morceaux de l’album Another 48 Hrs. sorti en 1990 ne donnaient pas forcément envie d’en entendre plus, la faute à un manque de respiration entre deux longs morceaux d’action de sept et cinq minutes.
Mais après l’écoute, le constat est simple : Intrada peut être fier de ces nouvelles éditions qui permettent de redécouvrir le travail de James Horner avec un regard neuf.
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Le « Main Title (Alternate) propose des couleurs rythmiques et un jeu de basse différents. Le long solo improvisé de saxophone est complètement différent entre les deux versions de « Subway Station » et « Luther’s Bus (Alternate) » présente un mixage différent du saxophone.
Enfin, le gros atout de cette nouvelle édition de 48Hrs. est sa qualité sonore exceptionnelle. Paramount Pictures a pu retrouver les mixages stéréo originaux et fournir à Intrada des transferts haute résolution de chaque bobine. Comme l’explique le producteur Douglass Fake dans le booklet (ces commentaires sont toujours éclairants sur les coulisses), ces nouvelles bobines ont permis d'équilibrer correctement le canal central et le jeu des cuivres entre la gauche et la droite. Le son est d’une clarté saisissante!
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Pour Another 48 Hrs., James Horner respecte l’ADN de 48 Hrs., sa thématique comme son instrumentation. La basse électrique, les boîtes à rythmes, le piano, les steel drums, le saxophone et les cuivres font leur retour, mais la nouveauté majeure est le recours au shakuhachi, cette flûte de bambou, lointaine cousine japonaise de la flûte de pan, pour illustrer à l’écran les méchants de ce second opus et au-delà, la menace qui pèse sur le personnage de Jack qui risque ici de perdre son insigne.
L’album de 1990 proposait 19 minutes et 46 secondes de la musique de James Horner réparties en quatre morceaux : « The Courthouse » (3:18), « Main Title from Another 48 Hrs. » (4:11), « King Mei Shootout » (7:35) et « Birdcage Battle » (4:42). La nouvelle édition de 2022 propose une présentation avec 27 minutes supplémentaires! À cela s’ajoutent sept minutes réparties sur quatre titres bonus, dont la version déjà connue de « The Courthouse » plus courte de 90 secondes par rapport à sa version alternative intégrée dans la présentation du score.
Il est parfois reproché à certaines éditions étendues de proposer peu de musique supplémentaire et/ou de la musique qui peut être écoutée dans le film ou sur une piste isolée de DVD. Cette édition d’Another 48Hrs. n’a pas ses défauts.
Les morceaux de l’album de 1990 sont sur la colonne de gauche. Au centre, ceux de la nouvelle édition. À droite les morceaux présents dans le film et la durée durant laquelle ils peuvent être entendus.
Par exemple le morceau « Business at Barnstormer's Bar » est absent du film, le morceau « Reggie Gets Out » est entendu 20 secondes
Ainsi, en cumulant les différences de durée entre le film et l’album de 2022, le résultat donne 17 minutes n’apparaissant pas dans le film. L’ existence de ces 17 minutes était donc insoupçonnée!
Voici une petite liste non exhaustive des nouveautés : – « Do you know? » reprend la même formule énergique que le passage de la fusillade dans l’hôtel du premier épisode.
– « Business At Barnstormer's Bar » et « Reggie Gets Out » sont deux petits bijoux d’ambiance. Des pizz de contrebasses (« double bass pizz » en anglais) rythment le premier. Des baguettes en bois frappées et une basse rythment le second. Différents instruments se succèdent sur ces bases rythmiques : steel drums, saxophone, EWI, basse, shakuhachi, xylophone…
– « Diner Ambush » renvoie tout d’abord à la musique de la filature du premier film mais se termine sur une musique stressante (2:26) absente du film qui aurait ajouté une violence folle à la scène où un voyou armé s’approche dans le dos de Jack.
– « Prison Bus Attack » est un morceau d’action excitant commençant sur les quatre notes du danger au saxophone. Le shakuhachi intervient à chaque balle tirée, à chaque vitre brisée… Ça décoiffe!
– « Computer Profile » et « Backwards Drive » proposent une parenthèse rafraîchissante sur une rythmique autour des Steel Drums, la guitare, la basse et le piano électrique.
– Les couleurs graves (trombones, tuba, violoncelles et contrebasses) dans la seconde partie de « Phone Booth » annoncent les moments les plus sombres de Clear and Present Danger
– Le très court « Price Killing » renvoie aux moments les plus angoissants d’Aliens, le shakuhachi en plus.
– « The Courthouse » est rallongé d’une grosse minute au début du morceau. Cette nouvelle version accentue le sentiment d’accélération et de course contre le temps.
– Les deux versions de « Dirty Cop » proposent une rythmique inédite qui est reprise dans « Cruising The Birdcage ».
D’une manière générale, le score tout en rappelant le premier opus impressionne par l’écriture plus mature. James Horner prolonge l’univers musical du premier film, il étend sa palette avec de nouveaux sons qui n’étaient pas présents en 1982, il accentue les moments de dissonance pour mieux exprimer le caractère borderline de Jack, obligé de jouer le tout pour le tout pour sauver sa carrière de policier, mais aussi sa vie et celle de Reggie. Le recours à une section de cordes intensifie aussi la dramaturgie, comme ces élans au cœur de « Prison Bus Attack », « The Courthouse » ou la nappe de cordes qui sous-tend « Birdcage Battle ». La qualité sonore rend justice à la fidélité des masters digitaux mixés par Shawn Murphy et masterisés par Douglass Fake.
Cette édition inattendue du score complet de Another 48 Hrs. constitue donc une très agréable découverte chaudement recommandée. Le montage final du film et l’album de 1990 ne rendaient finalement pas justice au travail remarquable du compositeur pour son dernier film avec Walter Hill. Grâce au label Intrada, Another 48 Hrs. retrouve la place qui aurait dû être la sienne depuis 32 ans dans l’œuvre de James Horner et dans nos cœurs : une musique singulière et intense.
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l'écriture et la publication de la biographie définitive sur le compositeur et sa carrière
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la production d'un documentaire avec des séquences inédites et exclusives
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la création d'un album CD avec des œuvres inédites
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la planification et l'organisation d'une série de concerts